Depuis la visite de Sarkozy en décembre 2007 à Alger, le climat des relations algéro-françaises continue à évoluer en “instable”, surtout que le séjour du président français à Alger a été dominé par les troublantes questions de mémoire remises au goût du jour. Le président français a été rattrapé à Alger par le poids de la loi sur la colonisation qui a fait monter au créneau la famille révolutionnaire. Occasion que n’a pas ratée le chef de la diplomatie française, principal auteur de l’ingérence humanitaire, qui a tenu des propos inélégants en réaction à la déclaration de Chérif Abbas, ministre des Moudjahidine.

Le chef de la diplomatie algérienne, qui recevait le président de la Commission des affaires étrangères de l’Assemblée française, M. Axel Poniatowski, a esquissé les dossiers qui seront traités lors de la visite du président Bouteflika à Paris. La communauté algérienne en France, la libre circulation des personnes dont la question des visas, l’UPM et bien entendu les investissements des entreprises françaises en Algérie. Les entreprises françaises, qui ont connu à un moment des difficultés, ont réussi à se ressaisir à travers le marché algérien, particulièrement lors du passage de Sarkozy au département de l’économie. Mais elles ont marqué le pas — probablement trop imprégnées de la culture de la chasse gardée — devant l’offensive des autres sociétés étrangères, notamment des Asiatiques. À tel point que sous divers prétextes, certaines entreprises françaises installées en Algérie ont clairement manifesté leur intention de délocaliser leurs activités. Cela, toutefois, sans compter les effets de la crise financière mondiale sur l’économie de manière générale.

Au niveau politique, les relations n’ont pas dérogé à la règle du gel et du dégel, selon les circonstances, malgré les déclarations de bonnes intentions qui sont souvent parasitées par des pressions de lobbies dont les nostalgiques de l’époque coloniale qui sont revenus en force. Et Sarkozy de justifier ses rares petits reculs par des considérations économiques somme toute logiques et objectives. Il est souvent suggéré de laisser pour plus tard les questions sensibles, les questions qui gênent, comme celles liées à l’histoire commune qui minent les relations bilatérales. Les tentatives amorcées depuis Chirac ont buté contre le mur de cette douloureuse période. L’amendement de la loi du 23 février n’a pas suffi à réchauffer le climat entre Alger et Paris. Le dossier est remisé tel quel. Et en contrepartie, on ouvre le dossier des essais nucléaires français dans le Sud algérien.

Un pas est franchi enfin. En plus de l’indemnisation des victimes de ces essais, les deux pays ont convenu de traiter “le chapitre” de Reggane. Une réunion supplémentaire sur ce dossier se tiendra bientôt à Alger. Il s’agit de“dégager les thèmes de référence d'un travail d'identification aussi exhaustif que possible de la situation qui est celle des zones contaminées et, à partir de là, il pourra être élaboré un programme d'action pour la décontamination”, a indiqué M. Medelci à l’APS, après son entretien à Cordoue, en marge de la réunion des 5+5, avec le secrétaire général du ministère français des Affaires étrangères, M. Pierre Sellal.

Par ailleurs, le président de la Commission des AE de l’Assemblée française a souhaité la création d’une grande commission parlementaire mixte. La troisième du genre dans la diplomatie parlementaire française après celles créées avec la Russie et le Canada. En définitive, les relations algéro-françaises empreintes de passion et ponctuées de litigieux dossiers en suspens, dont le règlement est souvent remis à plus tard, continueront à évoluer selon les conjonctures, dominées par le volet économique en l’absence d’une véritable volonté politique de clore définitivement les dossiers entrouverts. Le désir de refondation achoppe encore sur des résistances qui ne cessent d’étaler un brouillard dans ce ciel déjà improbable. Sarkozy réussira-t-il alors à imprimer aux relations politiques le même rythme que celles économiques, lui qui se présente encore une fois comme le sauveur de l’entreprise française ?